lundi 22 juillet 2013
Ado naissant
"C'est un ado dans toute sa splendeur." La plupart du temps cette phrase
signifie que l'ado en question est paresseux, niais, sale, chiant.
Qu'il mange, dort, joue, mange et dort. Seulement voilà, les adolescents
ne sont pas tous des imbéciles avachis sur le canapé. Ils peuvent être
intelligents. Brillants même. Ils peuvent être ouverts, gentils, beaux,
propres, sympathiques. Après tout, ce sont les adultes de demain. Ce
sont des adultes naissants. Et si cette phrase n'était pas toujours
péjorative? Les parents pourraient dire "C'est un ado dans toute sa
splendeur" lorsque l'ado en question vient de ranger sa chambre ou bien
qu'il a réussi son examen. Ils pourraient le dire lorsque qu'ils sont
fiers de leur rejeton, lorsque celui-ci leur a montré de quoi il était
capable. Ils pourraient dire que l'ado est un miracle, que l'adolescence
est un cadeau de la nature. Mais non. Cette phrase est et restera
péjorative. Pourtant l'ado n'est il pas un être dans sa chrysalide à mis
chemin entre la chenille et le papillon? N'est il pas le petit oiseau
qui devient grand? Celui qui prend son envol pour quitter le nid
familial? L'ado n'est il pas l'avenir? L'adulte averti qui saura jongler
entre vie de famille et travail acharné? Mais la raison, la seule et
unique raison pour laquelle cette phrase est péjorative est la jalousie.
La mélancolie des parents de ne plus pouvoir faire ce qu'ils
souhaitent. La jalousie devant la chair de leur chair gaspillant
inutilement ses ressources devant un écran, la jalousie de cette liberté
qu'offre l'adolescence, de toutes ces découvertes qui leur sont passées
sous le nez. Peut-être même la peur que leur presque adulte plus tout à
fait enfant ne gâche sa vie trop vite, sans avoir pu en profiter. La
peur que les erreurs soient au rendez vous. Les mêmes que les leurs, ou
bien d'autres, pires encore. La peur de le voir partir. La peur qu'il
grandisse. Qu'il devienne autonome. La peur. La peur de l'inconnu, du
connu, de l'évitable, de l'inévitable. Toutes ces choses, ces peurs, ces
sentiments qui font qu'au final l'ado n'est qu'un imbécile à qui il
faut tout apprendre. Alors que peut-être ce sont ses parents qui
devraient réapprendre à vivre.
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